Idée contre-intuitive, n'est-ce pas? Alors, voici donc ce que l'on trouve dans les Statistiques fiscales des particuliers de Revenu Québec (pour lesquelles, malheureusement, 2009 est la dernière année disponible).
Tout d'abord, deux définitions:
- Le revenu total, c'est la ligne 199 de votre déclaration de revenus québécoises. Ce n'est pas seulement les revenus d'emploi, mais aussi les prestations d'AE, du RRQ, les pensions de vieillesse, les retraits aux REER, les dividendes imposables, les revenus de placements (dont les intérêts), les gains en capital imposables, les bourses d'études, etc. Bref, les lignes 101 à 164 de votre déclaration de revenus.
- L'impôt à payer, c'est la ligne 432 de votre déclaration de revenus.
Alors, sans surprise, lorsqu'on regarde l'évolution du revenu total de 1999 à 2009, on assiste à une augmentation constante, signe de la croissance de la population, des prix (car il s'agit de dollars courants) et de l'économie en générale.
Et voici le même graphique pour l'impôt à payer au gouvernement du Québec. On voit que malgré les baisses d'impôt, les montants que rapporte l'impôt ont, d'une manière générale, augmentés:
En fait, si l'impôt des particuliers a diminué, c'est en proportion du revenu total, soit le taux d'imposition moyen (de 11,2% en 1999 à 9,2% en 2009). Notez que c'est dans les premières années de la décennie que la baisse a été la plus importante (de 11,2% en 1999 à 9,4% en 2003):
Donc, l'impôt à payer, en proportion des revenus a effectivement diminué. Mais pour qui? Pour les faibles revenus? Pour les hauts revenus? Ou la classe moyenne?
C'est là que, dans mon dernier billet, je disais que les résultats m'avaient surpris. Parce que le tout est au beau fixe. Regardez les graphiques suivants. Avez-vous déjà vu des graphiques aussi ennuyants?
À gauche, c'est simplement la répartition du revenu total, entre le "top-20%" et le reste.
Entre 1999 et 2009, la part du revenu total absorbée par le 20% le plus riche a oscillé entre 50,2% et 51,6%. En 2009, le chiffre était de 50,9%. Et le 80% restant récoltait la différence.
À droite, c'est la répartition de l'impôt à payer, toujours entre le "top-20%" et le reste.
Entre 1999 et 2009, la part de l'impôt payée par le 20% le plus riche a oscillé entre 69,2% et 71,7%. En 2009, le chiffre était de 70,3%. Et le 80% restant payait la différence.
En d'autres mots, aucun changement majeur.
Côté revenus, on ne peut pas vraiment dire qu'il y a eu enrichissement des riches aux dépends du reste. Du moins, pas du 20% le plus riche. Si, par exemple, le 1% le plus riche s'est enrichi, c'est principalement aux dépends du 19% suivant.
Côté impôt, c'est vrai que le 20% le plus riche paie moins d'impôt en 2009 qu'en 1999. Le taux moyen est passé de 15,4% à 12,7%. Mais ce taux moyen a diminué pour tout le monde. Le choix voulant que si les impôts diminuent, ceux qui en profitent soient ceux qui en paient, a été respecté. De sorte que, sur l'impôt total auprès des particuliers (deuxième graphique), la part du 20% le plus riche n'a pas diminué, ni augmenté. Et d'autres mots, la baisse de l'impôt a été (presque) proportionnelle au revenu. Encore en d'autres mots, la baisse n'est ni progressive, ni régressive.
Je dis "presque" proportionnelle au revenu car pas parfaitement. Les montants en jeu sont les suivants. Si la part payée par le 20% le plus riche était demeuré au niveau de 1999, ils auraient payé 279 millions de moins en impôt. Si toutefois la part payée était demeuré au niveau de 2003, ils auraient payé 237 millions de plus en impôt. Il s'agit toutefois d'une évaluation statique, extrêmement simpliste.
MAIS, il y a plusieurs de "mais" à ce billet. Par exemple: la baisse de l'impôt a impliqué que le gouvernement se tourne vers d'autres types de financement, comme la taxe de vente ou la tarification (permis de conduire, hydro-électricité, taxes sur l'essence) où la progressivité n'est pas toujours présente. Ou encore, le fait que l'impôt à payer augmente ou diminue n'est pas seulement dû à la volonté du gouvernement, cela peut notamment être dû à l'utilisation ou non de certaines déductions fiscales (les REER par exemple).
Mais l'idée derrière ce billet est de montrer que contrairement à une idée reçue, les baisses d'impôt ont profité à presque tout le monde, proportionnellement à leur revenu, et que l'allègement du fardeau de l'impôt sur le revenu n'a pas été plus important pour un groupe plus qu'un autre.
Enfin, c'est ce que je vois en regardant les chiffres officiels de Revenu Québec. Si vous y voyez autres choses, n'hésitez pas à le partager.
Note: pour des raisons évidentes, on ne peut pas regarder les chiffres pour un revenu précis (50 000 $ par exemple). Il faut plutôt regarder pour des fourchettes de revenus. Aussi, de simplement regarder l’évolution des « 100 000 $ et plus » serait d’aucun intérêt puisque ce groupe grossit d’une année à l’autre, simplement parce que les revenus augmentent. C'est pourquoi je coupe la population des contribuables en deux groupes (80% et 20%) et je maintiens cette séparation au fil des ans.
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